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A propos d’un autre dérapage de la science chinoise, lorsqu’une équipe de l’Institut des neurosciences de Shanghai avait annoncé en janvier 2018 avoir cloné des macaques, Le Tempsavait souligné que le risque pour les scientifiques européens «était sans doute de ne rien faire».
Cette fois, Européens et Américains ont agi. Leur approche, qui laisse le champ libre à l’usage de CRISPR-Cas9 à des fins de recherche ainsi que sur les cellules somatiques (qui ne sont pas héréditaires), fait preuve d’un pragmatisme bienvenu. CRISPR-Cas9 demeure un outil révolutionnaire en sciences du vivant, un rêve de généticien autorisant une manipulation de l’ADN de manière simple, contrôlée, et surtout d’une précision inégalée.
L’OMS bien placée
Reste à voir ce qu’il adviendra après cet appel. Sera-t-il suivi? Par les pays occidentaux, sans doute. C’est d’ailleurs déjà le cas des Etats-Unis. Mais la question de l’application reste cruciale. De nombreux Etats possèdent déjà des cadres réglementaires, y compris la Chine. On connaît la suite.
Autre question à résoudre rapidement, à quoi devra ressembler la gouvernance internationale souhaitée? La revue Nature – britannique – suggère que cette future structure pourrait s’inspirer de l’autorité de la fertilisation humaine et de l’embryologie du Royaume-Uni.
Et si l’Organisation mondiale de la santé (OMS) avait une carte à jouer? Elle apparaît bien placée pour prendre la main sur ce dossier. Fin 2018, elle avait annoncé mettre en place un panel d’experts ayant pour tâche l’examen des défis scientifiques, éthiques, sociaux et légaux de l’édition du génome. Ses membres doivent se réunir pour la première fois le 18 mars à Genève: les discussions s’annoncent passionnantes.
Enfin, les propositions de recherche soumises à cette future autorité devront nécessairement être en accès public et dans la transparence la plus totale. C’est à ce prix que l’on maintiendra – ou restaurera – la confiance quelque peu écornée du public envers les ciseaux à ADN.